Dictionnaire de la langue nahuatl classique
Eléments de grammaire
Le suffixe -tzin
Sur les prédicats non-verbaux le suffixe -tzin a originellement un sens diminutif, mais en nahuatl classique il est une marque de respect ou d'affection.
Il est suivi du suffixe absolu si le nom auquel il est ajouté comporte normalement ce suffixe:
in cihuātzintli, la femme honorée ou chère.
in piltzintli, l'enfant chéri.
ca cualtzintli, il est joli.
Mais:
in chichitzin, le chien chéri.
Le pluriel se fait par redoublement du suffixe (avec voyelle brève -tzitzin), suivi de -tin si le singulier a -tli. Le redoublement initial du nom est maintenu.
in cihuātzitzintin, les femmes respectées.
in pīpiltzitzintin, les enfants chéris.
in chichitzitzin, les chiens chéris.
Devant -tzin, le suffixe participial a la forme -cā- et on ajoute en général le suffixe absolu -tli.
in calehcātzintli, le respectable propriétaire.
La forme possédée est régulière. Au pluriel, le redoublement -tzitzin se maintient, et -huān peut arriver avant ou après (mais, comme d'habitude le redoublement initial du nom disparaît):
nopiltzin, mon enfant chéri.
nopiltzitzinhuān ou nopilhuāntzitzin, mes enfants chéris.
Le vocatif de cette forme possédée est -tzé plutôt que -tziné.
nopiltzé, toi, mon fils chéri.
Un principe des formes honorifiques (c'est à dire des marques de respect) du nahuatl est qu'elles ne sont jamais employées pour parler de soi, quelle que soit la majesté de celui qui parle.
Le suffixe honorifique -tzin ne s'utilise donc normalement pas avec un préfixe posssessif à la première personne sauf dans le cas ou l'objet possédé est par lui-même digne de respect.
tinonāntzin, tu es ma mère (honorifique), mais nimonān, je suis ta mère (sans suffixe honorifique).
Un enfant parlant à ses parents ou de ses parents dit toujours nonāntzin, notahtzin. Parlant à quelqu'un de ses parents, on lui dit aussi monāntzin, motahtzin.
Ainsi le suffixe -tzin de la forme possédée marque, soit le respect du 'possédé' (dans nonāntzin c'est ma mère que je respecte), soit celui du 'possesseur', si l'on dit à quelqu'un mopetlatzin, ta natte (honorifique), c'est évidemment le possesseur de la natte que l'on respecte, non la natte elle-même.
Le respect exprimé par l'honorifique peut porter sur une 3ème personne aussi bien que sur la deuxième personne.