Dictionnaire de la langue nahuatl classique
Eléments de grammaire
les comparatifs
comparatifs de supériorité
comparatifs d'égalité
1. Comparatifs de supériorité.
a) un premier type de tournures consiste à dire, avec quelques variantes, ‘X est plus fort, pas Y’.
Il y a le plus souvent une marque d’intensité devant l’adjectif : ce peut-être oc ‘encore’, cencah ‘très’, achi ‘plutôt’, yeh ‘cependant’, ou le plus souvent une combinaison oc achi (la plus fréquente), oc cencah, oc yeh, oc yeh achi, oc yeh cencah
oc (yeh) achi nichicāhuac in ahmo tehhuātl
ou
oc (yeh) cencah nichicāhuac in ahmo tehhuātl
Je suis plus fort que toi.
Au lieu de achi ou cencah, on peut avoir tāchcāuh ‘fortement’ ou huālcah ‘davantage’ ; mais le plus souvent oc tāchcāuh et oc huālcah sont suivis de in ic :
oc tāchcāuh in ic nichicāhuac in ahmo tehhuātl
ou
oc huālcah in ic nichicāhuac in ahmo tehhuātl
Je suis plus fort que toi.
On peut aussi se servir de tlapanahuia litt. ‘ça dépasse’ :
oc tlapanahuia in ic nichicāhuac in ahmo tehhuātl (le sujet de tlapanahuia est inic nichicāhuac, ‘la façon dont je suis fort’).
On peut combiner tāchcāuh, huālcah et tlapanahuia avec cencah pour avoir un comparatif renforcé.
oc cencah tāchcāuh inic nichicāhuac in ahmo tehhuātl
ou
oc cencah tlapanahuia inic nichicāhuac in ahmo tehhuātl
ou
cencah oc huālcah inic nichicāhuac in ahmo tehhuātl
Je suis beaucoup plus fort que toi.
Dans le deuxième membre de la tournure (le terme auquel on compare), on peut ajouter mach ‘à ce qu’il paraît’, ‘semble-t-il’ et iuhqui ‘pareil’ :
oc achi nichicāhuac in ahmo mach (ou : iuhqui; ou mach iuhqui) tehhuātl
Si le terme auquel on compare comporte un nom défini, il doit être précédé de yeh(huātl) (contrainte de l’indétermination du prédicat, Launey Introd. IV 2-c p.44).
oc achi nichicāhuac in ahmo yeh (in) Pedro
Je suis plus fort que Pierre.
oc achi tihuēhueh in ahmo yeh (in) nocōl in nocih
Tu es plus vieux que mon grand-père et ma grand-mère.
b) une deuxième tournure consiste à dire ‘X surpasse Y en tant que (inic) il est fort’, ou ‘X surpasse Y en ce qui concerne la force (in ītech + Nom abstrait dérivé).
nimitzpanahuia inic nichicāhuac
ou
nimitzpanahuia in ītech chicāhuacāyōtl
Je suis plus fort que toi.
2. Comparatif d’égalité.
On peut l’exprimer avec iuhqui(n) (Cf. Launey Introd. XIV 5 p. 129) dans des phrases comme :
iuhquin tocēlōtl tichicāhuac
Tu es aussi fort qu’un jaguar.
Le terme de comparaison doit être accordé en personne.
ahmo iuhqui in tinontli in tinemiz
Tu ne vivras pas comme si tu (étais) muet.
Mais cette tournure est soumise à la contrainte de l’indétermination du prédicat (Cf. Launey Introd. IV 2-c p.44). Si l’on veut dire p.ex. ‘tu es fort comme mon père, aussi fort que mon père’ (ou : ‘que moi, que Pierre, que le jaguar’), il faut répéter iuhqui:
iuhqui tichicāhuac in iuhqui notahtzin (nehhuātl, Pedro, yeh in ocēlōtl)
Tu es aussi fort que mon père (moi, Pierre, le jaguar).
La même tournure peut servir à comparer autre chose que des ‘adjectifs’, et en particulier des verbes. Mais on a alors iuh au lieu de iuhqui:
iuh xicchīhua in iuh quimonequiltia in Dios
Agis comme Dieu le veut.
ahmo iuh nemiliznequi in iuh nenca ītahtzin
Il ne veut pas vivre comme son père a vécu.
On peut inverser l’ordre des termes de la comparaison, celui auquel on compare arrivant avant celui qu’on compare ; mais ce dernier est alors le plus souvent introduit par zan nō iuh (litt. ‘seulement aussi pareil’) :
auh in iuh onhuetzqueh tleco zan nō iuh huālquīzqueh
Et comme ils tombèrent au feu, de même ils en sortirent.
Le premier in iuh pourrait être remplacé par in quēnin (Cf. Launey Introd. XIV 6 p. 130).
in quēnin miqui in icnōtzin zan nō iuh miqui in tlahtoāni
Comme meurt le pauvre, ainsi meurt le roi.
On peut aussi répéter in ic…in ic…:
in ic ōtitētolīnih in ic titolīnīlōz
Comme tu as rendu les autres malheureux, de la même façon on te rendra malheureux.
Pour dire ‘aussi grand que…’, ou ‘aussi nombreux que…’, on se sert respectivement de īxquich et īzqui(ntin) (Cf. Launey Introd. XXV 2 pp. 237-238).
inin tōtōtl ca īxquich in canauhtli
Cet oiseau est de la taille du canard.
Le comparatif d’infériorité se forme en niant le comparatif d’égalité :
ahmo iuhqui nichicāhuac in iuhqui tehhuātl
Je ne suis pas aussi fort que toi, je suis moins fort que toi.
Launey Introduction pp. 311-313.